13 juin 2006

Introduction à la musique classique #10: musique classique et institution.


"J'arrive de Los Angeles où on en est rendu à donner des billets à des étudiants universitaires pour assister à un concert classique et les jeunes n'en veulent pas. On doit leur donner des notes sur leur participation à l'activité pour qu'ils y assistent. (référence)"
-Alain Lefèvre.


Si la musique classique semble devenir de moins en moins populaire avec le temps, il est facile d'en déceler les principales raisons. Si la musique classique vit une crise réelle en ce moment, je crois que c'est avant tout à cause de son institution.

Musique et bourgeoisie.
Pourquoi est-il de mise de s'habiller chic lorsque l'on va à un concert de musique classique? Ce n'est pourtant pas le cas, habituellement, au théâtre, au musée ni même à une exposition. Cela provient probablement du fait que la musique classique est (trop) souvent associée à un contexte où règnent l'austérité et l'opulence: les salles de concert sont souvent d'énormes édifices richement décorés, les musiciens sont presque toujours vêtus en habit ou en robe de soirée noirs. C'est comme si la musique classique appartenait à une classe sociale élitiste et bourgeoise.

Pourtant, rien n'est plus faux. Comme je l'ai répété souvent ici, la musique classique est avant tout de la musique, et elle appartient d'abord et avant tout à l'auditeur. Sans oublier que la plupart des grands compositeurs, comme Beehtoven ou Mozart, n'étaient pas riches. La musique classique n'est pas un produit de la bourgeoisie; comme l'affirme le pianiste québécois Alain Lefèvre, la musique classique est "en train de devenir un phénomène strictement réservé aux très fortunés pour soigner leur image" (référence).

Les pièges du concert.
La manifestation la plus directe de l'institutionnalisation de la musique classique est sans doute le concert. Si vous n'avez jamais été à un concert de musique classique qui se déroule selon les protocoles les plus stricts, j'ai pour vous quelques points importants à souligner:

  • ne vous attardez pas trop aux programmes écrits du concert; ils sont souvent rédigés dans un jargon musical que seuls les critiques peuvent comprendre, et ils ne donnent habituellement aucune réelle information utile quant aux pièces qui seront interprétées, tels que les intentions du compositeur, le contexte historique de la musique, etc.

  • ne vous attendez pas à ce que le chef d'orchestre ou un musicien prenne le temps de vous parler de la musique qui va être jouée, afin de vous faire comprendre ce qui rend la musique intéressante et unique.

  • ne vous habillez pas chic si vous n'en avez envie; après tout, le concert se déroule normalement sans éclairage dans la salle, comme au théâtre.

Bref, je ne veux pas dire que vous ne devriez jamais aller à un concert de musique classique, cela peut s'avérer une expérience vraiment exaltante. Seulement, j'ai trop souvent l'impression que le public aux concerts de musique classique est traité comme s'il fallait faire partie d'une certaine élite sociale qui sait d'avance tout ce qu'il y a à savoir pour apprécier la musique.

Le paradoxe de la musique classique.
L'idée que je voulais transmettre avec ce blogue, c'est que, selon moi, découvrir la musique est avant tout une expérience personnelle et, parfois, solitaire. J'ajouterai que pour en profiter pleinement, il faut tenter d'éviter les paradoxes qui existent entre la musique en elle-même, qui appartient à tout le monde, et son institutionnalisation, qui tente de faire de la musique classique une exclusivité réservée à une certaine élite sociale.

Comme le souligne encore Alain Lefèvre, "la musique doit être attirante pour les jeunes, (...) manifestement passionnés par la question. C'est le même principe que Harry Potter en littérature. C'est bon parce que ça amène les jeunes à lire mais en autant qu'ils restent capables de faire la différence entre ça et du Michel Tremblay ou du Victor Hugo (référence)." Plus vous allez devenir curieux, plus vous allez vous rendre compte que la musique classique n'est pas une affaire de classe sociale, mais bien une affaire de goût.

Ce billet est la conclusion de ce blogue; j'espère que j'ai réussi à piquer votre curiosité pour la musique classique, et, surtout, à vous faire comprendre que la plupart des compositeurs de classique ont écrit leurs oeuvres avant tout pour vous, pour moi, bref, pour tout le monde...

Merci!